I. Qu'est-ce-que le délit d'entrave ?
Il est constitué par le fait, pour un employeur ou pour la personne à qui il a délégué ses pouvoirs (1), de porter atteinte à :
-
la libre désignation d'une instance représentative du personnel dans l'entreprise, quelle qu'elle soit (CE, délégués du personnel, CHSCT, délégué syndical…) ;
-
l'exercice régulier des fonctions de votre instance représentative du personnel ;
-
l'exercice de votre droit syndical dans l'entreprise.
Constituent par exemple des délits d'entrave :
-
ne pas réunir le CE ou les délégués du personnel périodiquement (2),
-
le refus de l'employeur d'organiser les élections des délégués du personnel, de procéder aux réunions mensuelles obligatoires et de tenir le registre spécial faisant état des revendications des délégués et des réponses motivées de l'employeur (3),
-
…
II. Comment est sanctionné le délit d'entrave : avant et après la loi Macron
Le délit d'entrave d'un employeur envers les représentants du personnel est désormais plus lourdement sanctionné financièrement mais, le risque d'un an d'emprisonnement a été supprimé dans certains cas.
Explications :
Avant la publication de la loi Macron du 6 août 2015, l'entrave apportée aux IRP était puni par une amende de 3.750 euros (7.500 euros désormais) et dans certains cas, pouvaient conduire à un an d'emprisonnement.
La loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques limite donc les effets du délit d'entrave à une peine d'amende non assortie d'une menace d'emprisonnement ! Toutefois, reconnaissons que, dans les faits, rarissimes sont les peines d'emprisonnement prononcées sur le fondement d'un délit d'entrave. Au tout début, le projet de Loi Macron prévoyait sa dépénalisation pure et simple. Tel n'est donc pas le cas totalement !
Voici ce que risque désormais un employeur pour délit d'entrave.
A. Risque seulement une amende de 7.500 euros, l'employeur qui :
-
porte ou tente de porter atteinte à l'exercice régulier des délégués du personnel (4) ;
-
apporter une entrave au fonctionnement régulier du comité d'entreprise (CE), du comité d'établissement ou du comité central d'entreprise (CCE) (5), du groupe spécial de négociation ou du comité d'entreprise européen (6), du comité de la société européenne (7), du comité de la société coopérative européenne (8), du comité de la société issue de la fusion transfrontalière (9), du comité de groupe (10) ou du CHCST (11) ;
-
dans une entreprise d'au moins 300 salariés ou dans un établissement distinct comportant au moins 300 salariés, n'établit pas et ne soumet pas annuellement au comité d'entreprise ou d'établissement le bilan social d'entreprise ou d'établissement (12).
Pour tous ces cas, l'épée de Damoclès, censé être dissuasive, de l'emprisonnement d'une année a donc été supprimée.
B. Risque toujours un emprisonnement d'une durée d'1 an mais désormais une amende de 7.500 euros, l'employeur qui :
-
porte ou de tente de porter atteinte à la libre désignation des délégués du personnel (4) ;
-
apporte une entrave soit à la constitution d'un comité d'entreprise, d'un comité d'établissement ou d'un comité central d'entreprise, soit à la libre désignation de leurs membres (5) ;
-
apporte une entrave soit à la constitution d'un groupe spécial de négociation, d'un comité d'entreprise européen ou à la mise en oeuvre d'une procédure d'information et de consultation, soit à la libre désignation de leurs membres (6) ;
-
apporte une entrave soit à la constitution d'un groupe spécial de négociation, d'un comité de la société européenne (7) , d'un comité de la société coopérative européenne (8), d'un comité de la société issue de la fusion transfrontalière (9) soit à la libre désignation de leurs membres;
-
ne constitue pas et ne réunit pas pour la première fois un comité de groupe ou qui apporte une entrave à la désignation des membres d'un comité de groupe (10) ;
-
porte atteinte ou tente de porter atteinte soit à la constitution, soit à la libre désignation des membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) (11).
C. Tableau récapitulatif
Nature du délit d'entrave
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Amende de 7.500 euros
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Emprisonnement d'1 an
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Délégués du personnel (4) :
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porter ou tenter de porter atteinte à leur libre désignation;
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porter ou tenter de porter atteinte à l'exercice régulier de l'instance
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Oui
Oui
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Oui
Non
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CE, comité d'établissement, CCE (5) :
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apporter une entrave soit à la constitution d'un comité d'entreprise, d'un comité d'établissement ou d'un comité central d'entreprise, soit à la libre désignation de leurs membres
-
apporter une entrave au fonctionnement régulier de l'instance
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Oui
Oui
|
Oui
Non
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Comité d'entreprise européen (6) :
-
apporter une entrave soit à leur constitution ou à la mise en oeuvre d'une procédure d'information et de consultation, soit à la libre désignation de leurs membres
-
apporter une entrave au fonctionnement régulier de l'instance
|
Oui
Oui
|
Oui
Non
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Comité de groupe (10) :
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ne pas constituer et réunir pour la première fois un comité de groupe ou apporter une entrave à la désignation des membres d'un comité de groupe
-
apporter une entrave au fonctionnement régulier de l'instance
|
Oui
Oui
|
Oui
Non
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CHSCT (11) :
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porter atteinte ou tenter de porter atteinte soit à la constitution, soit à la libre désignation des membres
-
apporter une entrave au fonctionnement régulier de l'instance
|
Oui
Oui
|
Oui
Non
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Références :
(1) Cass. Crim. 10 juin 1986, n°85-94516
(2) Cass. Crim. 25 septembre 2007, n°06-84599
(3) Cass. Crim. 5 mars 2013, n°11-83984
(4) Article L2316-1 du Code du travail
(5) Article L2328-1 du Code du travail
(6) Article L2346-1 du Code du travail
(7) Article L2355-1 du code du travail
(8) Article L2365-1 du code du travail
(9) Article L2375-1 du Code du travail
(10) Article L2335-1 du Code du travail
(11) Article L 4742-1 du Code du travail
(12) Article L2328-2 du Code du travail
Source : http://www.juritravail.com/
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